Don't touch... It's hard. But don't touch... [Ft Bleuet]

Il est bien rare que la maison soit vide. C'est trop grand, trop silencieux pour que je ne me sens bien. Je hais le silence, hais le fait d'être tout seul dans la maison. C'est un peu comme si l'overdose de silence était oppressant pour moi. Je me sens déjà mieux quand il y a du monde. Enfin, pas trop. Suffisamment pour faire un peu de bruit.
C'est aussi pour ça que la télévision est sans cesse allumé chez moi. Un fond sonore, tout simplement.
Aujourd'hui, c'était un peu comme tout les jours. Enfin, les jours où je ne travaille pas. Je m'affale sur le canapé, la télévision pour seule compagnie quand mes colocataires ne sont pas là. C'est bizarre tout de même. 35 ans et en colocation. Ca fait un mois que je suis ici, maintenant. Et j'ai l'impression que ça ne change rien. Je n'ai toujours aucun souvenir d'avant mon éveil. Et ça me frustre que personne ne viennent vers moi.
Par moment, je me lève et je me dis que quelqu'un va venir frapper à ma porte. Me donner mon nom, répondre à toutes mes questions... Mais chaque jours, ça n'arrive pas. Et ça me désole.

Enfin non, ce qui me désole à ce moment précis, c'est de ne pas bouger. Je sais que je dois rejoindre Ananas. Ananas, c'est Bleuet. Un ami. Enfin, si on peut se qualifier d'ami. C'est compliqué. Une attirance physique que j'ai énormément de mal à réprimer. C'est un peu comme si en un seul regard, tout les besoins primaires humaines grimpent en flèche et m'empêche de réfléchir avec le bon cerveau. C'est bien connu, on a deux cerveaux, un en haut, un en bas. Et bien souvent, c'est compliqué de se servir du bon quand il faut.
Ca ne fait pas longtemps que l'on se connaît. Quelques semaines. Deux peut-être et c'est difficile de tenir mes fringues quand il est dans les parages.
Une addiction charnelle difficile à contenir. Les bras croisés sur mon torse, je fixe l'écran de la télévision sans grande envie de m'y attarder. Ce n'est pas intéressant, pas du tout. Je pense qu'il vaut mieux que je sorte. Je peux très bien trouver quelque chose à faire avant que Bleuet ne me rejoignent.
J'attrape mon portable et me lève déjà. Je ne me change pas. Un t-shirt rouge et un jean, c'est suffisant.

Je sors de la maison et attrape le bus. Je m'affale sur le siège et les rues défiles déjà. Je ne comprends pas toujours ce qui s'est passé. Je me souviens de mon boulot, des rues que j'empruntais. Mais pourquoi je n'arrive pas à retrouver ma propre vie, celle d'avant. Est-ce que j'ai fais quelque chose que mon cerveau refuse de recoller ? Tuer quelqu'un ? Braquer une banque ? Non, même la pire des choses. Hors traumatisme, je devrais pouvoir les retrouver. Ou des bribes ? Je ne sais pas. J'imagine que ça reviendra avec le temps. Ou peut-être pas. Je ne sais pas.

L'arrêt pour le centre commercial arrivent bien vite lorsque je me perd dans mon esprit. Je me lève donc et descend pour entrer dans le grand magasin. Il y a de tout ici. Des fringues, des restaurants, des marchands de glace, de beignet. Je ne sais quoi d'autres. Et les glaces, beignets, moi. J'adore ça ! Sauf que mon cul ne le supporte pas. Pas du tout. Et ça donne vraiment envie de chialer. Enfin, dans le sens figuré, je ne vais pas me mettre à pleurer comme ça, pour des sucreries.
Je passe une bonne heure à m'y balader avant de m'installer sur un banc. Je regarde chaque visage, essayant d'en trouver un qui me rappelle quelque chose. Je sais qu'Ananas ne devrait pas tarder. Alors autant rester à un seul endroit. C'est bien mieux.

Respiration haletante, tu cours. Oui, tu cours pour échapper à ce besoin constant de réponses, de ressenti. Tu évites les passants, tu ne veux pas les toucher. Non, tu ne veux pas savoir ce qu’ils pensent, ce qu’ils ressentent. Ecouteurs dans les oreilles, tu laisses tes pieds frapper le sol à une allure régulière. Ton haut te colle à la peau, dévoilant la moitié de tes bras, un corps musclé que tu cherches à préserver et ce, malgré les brûlures et les cicatrices qui se cachent sous le bout de tissu. Et tu laisses tes muscles se tendre, le meilleur moyen pour toi d’évacuer cette frustration que tu as accumulé, que tu vas accumuler. Aujourd’hui, tu as rendez-vous avec Link, ce qui allait te demander un contrôle extrême. Attirance physique innommable, tu as sans cesse se foutu besoin de te rapprocher, de vouloir lui sauter dessus. Vous aviez déjà couché ensemble une fois et, sincèrement, dire que ce n’était pas bien serait mentir, que du contraire, tu avais même trop apprécié. Peut-être à cause du fait que vous étiez tous les deux mentalistes et donc, votre connexion n’en a été que plus forte. Tu l’as entendu penser, tu as senti ce qu’il voulait ce qu’il désirait et ce fut la même chose de son côté. Cette idée te fait frissonner, alors que la vision de vos caresses s’impose une fois de plus à toi. Aurais-tu un souci avec les relations charnelles ? Bonne question, depuis ton réveil tu as quand même couché avec deux mecs.

Tu montes les escaliers de ton immeuble, le palpitant battant la chamade alors que tu ouvres ta porte d’entrée. Directement, tu ôtes tes habites pour filer sous la douche devant l’heure avancé. Tu vas finir par être en retard, néanmoins, tu devais courir, c’était indispensable surtout avant de faire face à Link. L’eau, tu la laisse froide, littéralement. Tu ne veux pas tenter le diable, manquer de surchauffer alors oui, tu mettras toutes les chances de ton côté. Une fois dehors, tu enfiles un jeans foncé et un haut à rayures ainsi qu’une veste en cuir. Rien de bien palpitant, non, mais cette tenue t’allait certainement bien. Choppant tes clefs de voitures, tu files vers le lieu de rendez-vous, légèrement nerveux par tes retrouvailles avec le jeune homme. Tu allais devoir garder un contrôle sur tes pulsions, parce que évidemment, tu te doutais que tu allais ressentir l’envie de sauter dessus. Etais-ce pour ça que vous évitiez de vous toucher depuis ? Evitant ainsi toutes tentations possibles ? Sûrement, certainement. Une fois garé, tu essayes de dompter tes cheveux, peine perdue…De toute façon, tu finiras par passer ta main dans ta tignasse et, une fois de plus, tu te décoifferas. Pour pas changer. Abandonnant la partie, tu sors du véhicule et tu entres dans le centre commercial. Portable en mai, tu envoies un message à Link, demandant où il se trouvait. En attendant sa réponse, tu fonces chercher un café dont tu as également besoin. Accro à la caféine oblige.

La réponse ne tarda pas à faire vibrer ton téléphone et, une fois ton café en main, tu te diriges vers l’endroit indiqué. Rapidement, ton regard frôle le corps tant désiré et, déjà, tes hormones semblent se réveiller. Portant à tes lèvres le gobelet chaud, tu en viens à te bruler la langue. Super ! ça avait au moins eu l’effet de te ramener sur terre… « Salut…désolé du retard, j’ai été courir, j’ai dû me doucher, puis j’ai pris un café…bref, c’est de ma faute. » Tu souris en coin, restant assez distant tout en étant sûrement déjà trop proche. Ton regard sombre glisse dans le sien, s’y perd, s’y accroche comme un automatisme. « On va manger un bout ? Je meurs de faim… » Etrangement, ta voix a pris une tournure assez suave…Oui tu meurs de faim et pas seulement niveau alimentation. Super Blue, faut que tu reprennes une douche froide !