▬ don't speak

La nuit offrait toujours une discrétion qu’il appréciait. En hauteur, perché à une fenêtre, le téléphone à la main, il supervisait l’opération. Tout avait été calculé au détail près. Personne ne savait ce qu’il se passait ici, pas même ses collègues. Ce genre d’opération, il n’en partageait les informations et le déroulement qu’avec ceux qui y participaient, et encore, il s’en gardait certains détails. Des phares se font soudainement présents, et le bruit de plusieurs moteurs s’élevait au dessus des sons vivant dans ce secteur de la ville. Un camion aurait été beaucoup trop visible, et prévisible. Cette fois-ci, Rude avait préféré compter sur quatre motos pour se faire livrer sa cargaison. Chaque véhicule avait emprunté un chemin différent pour se retrouver dans cet entrepôt à la même heure, et comme prévu, aucun n’était en retard. Rapidement, il composa un numéro sur son écran, et deux hommes sortirent de l’ombre pour accueillir les arrivants. Minimiser les effectifs était peut-être risqué aux yeux de certains, mais pour lui, c’était une façon efficace de limiter les fuites et disparaître dans la nuit. Habilement, il sortit une cigarette de son paquet et la glissa entre ses lèvres, ses yeux ne quittant à aucun moment la scène. Son regard passait des conducteurs des motos, qui ouvraient les coffres de leurs véhicules, aux hommes qui réceptionnaient la marchandise, pour finalement regarder plus loin, où aucune âme ne vivait. Etre en hauteur, permettait d’avoir une vue plus ample de la scène, être en hauteur, donnait un recul que les acteurs ne pouvaient avoir.

Rude surveillait l’heure, dans dix minutes ils devaient quitter les lieux, y rester plus longtemps supposait trop de risques. Et puis, soudain, un de ses hommes se mit à courir, le téléphone dans sa main sonnant dans la seconde suivante. « Boss, il y avait quelqu’un, Dan l’a aperçu et est parti à sa poursuite ! ». Ses sourcils se froncèrent, il écrasa sa cigarette sous son pied, et en vitesse il rejoint les escaliers pour descendre. « Qu’il ne le lâche pas. »

L’odeur d’essence l’accueillit lorsqu’il se trouva au niveau des motos. « Lei, suis le plan, amène cette cargaison à bon port. Vous de même. » Et si quelque chose d’autre arrive, son téléphone est à appeler, mais ça, c’était sous-entendu. Ore aurait pu emprunter l'une des motos, mais à pied ce serait plus facile ; les deux autres couraient, ils ne pouvaient pas être aussi loin. Le jeune homme se mit à courir, regardant sans cesse autour de lui, en silence. Pourvu que ce ne soient pas les cobras…